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Férias génériques
 de Laurent Gueneau

Le bain du roi
Rampant d'argent sur champ de sinople, dragon 

Fluide, au soleil de la Vistule se boursoufle.
 
 Or le roi de Pologne, ancien roi d'Aragon, 

Se hâte vers son bain, très nu, puissant maroufle.

Les pairs étaient douzaine : il est sans parangon.
 
Son lard tremble à sa marche et la terre à son souffle ;
 
Pour chacun de ses pas son orteil patagon 

Lui taille au creux du sable une neuve pantoufle.

Et couvert de son ventre ainsi que d'un écu

Il va. La redondance illustre de son cul

Affirme insuffisant le caleçon vulgaire

Où sont portraicturés en or, au naturel, 

Par derrière, un Peau-Rouge au sentier de la guerre
 
Sur un cheval, et par devant, la Tour Eiffel.
Alfred Jarry
Primidi 21 vendémiaire 222


Les photographies de Laurent Gueneau égrènent des contenus qui ont la couleur de la Féria sans en avoir le goût, un peu de la même façon que ce fameux soda qui ressemblerait à s’y méprendre au whisky... Observations cliniques, les images analysent en coupe avec humour et finesse, les « us et les coutumes » du phénomène. L’habit par exemple, à l’occasion de cette fête populaire, le public se met sur son trente-et-un : chemises Soléiado et lacets western au col, couleurs vives, jupes sévillanes, bimbeloterie ostentatoire, larges décolletés, chapeaux de cowboys/gardians, etc. Les pantalons et les robes des festivaliers crient haut et fort leur adhésion convenue. S’il y avait du son à ces images, il oscillerait certainement entre une sévillane, le « Coupo Santo » de rigueur et le dernier tube du groupe Ricoune et les counass, grands habitués de cette fête. Coincé entre conservatisme tauromachique et marketing, la Féria se vend depuis longtemps maintenant en grande surface, elle s’infiltre au Mac Donald, débarque à Family Village…, à quand le premier hamburger au taureau de combat ! A moins qu’ils ne l’aient déjà fait… Le talent du photographe se situe-là, dans cette faculté à extraire du subterfuge la vérité.

Patrice Loubon, novembre 2013

Laurent Gueneau est né à Tonnerre en 1964. Il vit et travaille à Paris. Laurent Gueneau adopte la prise de vue grand format en 1994 et publie «Les tombeaux qui font sourire la mort» dans Connaissance des Arts. S’ensuit un long travail dans différentes villes d’Europe de l’Est. En 2001, il publie « 26.12.1999 », paysages après la tempête Lothar commandé par le Ministère de l’Agriculture. Il est invité en 2005 en résidence à Guangzhou. Il interroge l’urbain et le végétal.
Raymond Depardon retient ce travail pour l’édition 2006 des Rencontres d’Arles.
Entre 2008 et 2012, il est régulièrement invité en résidence à poursuivre une investigation sur le maillage urbain. Il est aujourd’hui en résidence à Brest avec l’Institut Européen de la Mer.
Son travail a notamment été exposé au Musée Pouchkine à Moscou, aux Rencontres d’Arles, à la Bibliothèque nationale de France, au Centre Atlantique de la Photographie à Brest, à la Scène nationale de Vandoeuvre et dans de nombreux festivals. En 2008, le Guongdong Muséum of Art lui consacre une exposition monographique.

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